chronique juridique
Ne pas confondre rappel à l’ordre et sanction
L’employeur dispose du pouvoir d’édicter des règles collectives de fonctionnement au sein de son entreprise, d’évaluer la qualité du travail des salariés placés sous son autorité et de constater les éventuels manquements ou insuffisances qui nuisent au développement de l’entreprise ou à la santé et à la sécurité de tous sur le lieu de travail. Une décision prise le 20 mars 2024 affirme la différence entre le simple rappel à l’ordre et la notification d’une sanction.
Qu’est-ce qui relève d’un manquement ?
Le manquement, ou faute, consiste dans le comportement avéré du salarié de ne pas respecter ses obligations à l’égard de son employeur. Le refus de respecter le cadre de travail prescrit par l’employeur, les violences verbales ou physiques, les fautes professionnelles intentionnelles ou non intentionnelles, le non-respect des consignes en matière de santé et de sécurité sont autant d’agissements susceptibles d’exposer le salarié à des sanctions de son employeur.
Toutefois, il n'existe pas de liste stricte des faits pouvant être considérés comme fautifs par l'employeur et pouvant entraîner une sanction. Il appartient alors à l’employeur de considérer comme fautif ou non l’agissement du salarié. A l’exception d’une faute pouvant donner lieu à des poursuites pénales, l’employeur dispose alors d’un délai de 2 mois maximum pour notifier la sanction du salarié à compter du jour où il a eu connaissance des faits qu’il considère comme fautif.
Qu’est-ce qu’une sanction disciplinaire ?
La sanction disciplinaire est une mesure prise par l’employeur, autre que les observations verbales, qui vise à constater l’agissement fautif du salarié, qu’elle soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence ou les conditions de travail du salarié dans l’entreprise. Elle peut prendre différentes formes allant de l’avertissement jusqu’au licenciement.
L'employeur est le seul juge de l'opportunité des poursuites. Il peut ainsi décider soit de sanctionner, soit de ne pas poursuivre la faute. Toutefois, le pouvoir disciplinaire de l'employeur est limité et doit s'exercer dans le seul intérêt du bon fonctionnement de l'entreprise.
À quels principes une sanction disciplinaire est-elle soumise ?
Si l’employeur est le seul juge de l’opportunité des poursuites, il doit toutefois respecter certains principes dans le choix de cette sanction.
Tout d’abord, la sanction ne doit répondre qu’à des considérations professionnelles dans le respect des principes de non-discrimination. Elle doit être équitable. Ainsi, les salariés ne peuvent pas être sanctionnés à des degrés différents entre eux pour une même faute commise. De plus, il n’est pas permis de sanctionner plusieurs fois une même faute.
Par ailleurs, la sanction doit être proportionnelle à la faute commise. Un manquement ayant de faibles conséquences pour l’entreprise ne peut pas justifier un licenciement. Cependant, l’historique des avertissements pris à l’encontre d’un salarié peut être pris en considération par l’employeur dans l’appréciation de la sanction. C’est le cas notamment lorsque le salarié fait déjà l’objet de plusieurs avertissements. L’employeur peut alors recourir à une sanction plus lourde pour les derniers faits commis.
Enfin, pour incarner la valeur de sanction, celle-ci doit respecter les conditions de formes, délais et procédures, qui sont fixées par le code du travail et le règlement intérieur lorsqu’il existe.
Un entretien disciplinaire préalable à la sanction est-il obligatoire ?
Aucune sanction ne peut être prise à l'encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui.
Avant cela, l’employeur qui envisage de sanctionner son salarié est tenu de le convoquer, au plus tard 5 jours ouvrables avant la date fixée, en lui précisant l’objet de l’entretien. Durant cet entretien il évoquera la sanction envisagée au salarié qui pourra partager ses explications. A l’issue de l’entretien, l’employeur peut sanctionner le salarié après un délai de réflexion de 2 jours suivant l’entretien et dans la limite d’un délai de 2 mois maximum à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de la faute.
Cependant, cet entretien n’est pas obligatoire lorsque la sanction envisagée est mineure. C’est le cas lorsque l’employeur émet un simple avertissement ou une sanction de même nature qui n’a pas d'incidence immédiate sur sa présence dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. Cette décision doit cependant être écrite et argumentée.
Quelles sont les précautions à prendre en cas de sanction mineure ?
Un rappel à l’ordre se limitant à demander au salarié de corriger son comportement, sans autre mesure prise à son encontre, ne constitue pas une sanction. Pour investir le caractère sanction de l’avertissement, la notification de l’employeur doit démontrer l’exercice du pouvoir disciplinaire de celui-ci. Ainsi, l’avertissement ou autre sanction de même nature, doit s’attacher à :
- Rappeler les faits reprochés au salarié sans oublier de les dater ;
- Expliquer en quoi ils constituent un manquement à ses obligations contractuelles ;
- Étayer les conséquences de ses agissements sur l’entreprise ;
- Appeler le salarié à corriger son comportement sous peine de s’exposer à une sanction plus lourde.
L’avertissement dure 3 ans. Les manquements répétés du salarié qui ont correctement été sanctionnés par l’employeur peuvent ainsi lui permettre de recourir à des sanctions plus lourdes allant jusqu’au licenciement. A défaut, l’employeur qui licencie son salarié sur la base d’un simple rappel à l’ordre s’expose à une requalification de la rupture sans cause réelle ni sérieuse et ainsi devoir d’importantes indemnités financières pour préjudice et rappels de salaires.
En fonction de la faute commise, la sanction et la procédure peuvent varier. Il peut donc être utile de se faire accompagner dans le choix de la sanction mais aussi dans la mise en œuvre des procédures. En effet, une erreur peut facilement remettre en cause la sanction prononcée et exposer l’employeur à des conséquences financières importantes. Votre FDSEA se tient à votre disposition pour vous accompagner.
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Source : Biemail FNSEA