Concours

Trophée des beaujolais nouveaux : place à la diversité

Il faudrait plus qu’un jour férié pour démotiver les fidèles dégustateurs qui viennent chaque année pour le trophée des beaujolais nouveaux. « C’est au moins la dixième année que je suis au rendez-vous, partage Nicolas Prost, œnologue chez Hansen. Pour moi, c’est une découverte totale de ce millésime car je n’ai pas eu l’occasion d’en déguster en amont. On trouve toujours des pépites, j’aime bien ce concours car il est très bien organisé. » À sa table, Pauline Corteel inaugure sa première participation au concours. Elle qui vient d’achever un bac professionnel viticulture œnologie dans le but de reprendre l’exploitation familiale trouve « une ambiance conviviale » dès 8h40. Il faut dire que la salle accueillante du domaine des communes de Anse est optimale pour accueillir les 85 dégustateurs, répartis sur 15 tables minutieusement préparées pour l’occasion.

Un millésime mesuré

Pour cette 23^e édition, « je note toujours autant de fidélité au rendez-vous », s’enthousiasme Alain Siodlak, président régional de l’Union des œnologues de France pour la partie Bourgogne Centre-Est, lors du discours d’entrée. C’est ensuite Bertrand Chatelet, directeur de la Sicarex, qui a fait une mise en bouche des conditions de production du millésime. Débourrement en avril, floraison en juin, printemps frais avec « un mois d’avril enregistré comme l'un des plus frais depuis l'existence du réseau maturation. Les précipitations de juin ont entrainé une intensité des travaux de palissage et de protection. Tout l’été a été régulièrement arrosé d’orages et parfois de quelques glaçons ». Le début de véraison s’est fait fin juillet mais le mois d’août a connu « des conditions contrastées avec de fortes chaleurs qui ont marqué la maturation. On peut qualifier ce millésime de mesuré avec un ban des vendanges au 1^er septembre ». La diversité nord / sud s’exprime avec des zones plus ou moins impactées par les orages.

À 9 h, place aux trois premières mises en bouche pour « se familiariser avec le millésime et permettre aux jurys de mieux appréhender les notations », enchaîne Hélène Granger, ancienne présidente régionale de l’Union des œnologues. Petit rappel pour les jurys, qui notent les vins sur 100 en fonction de la vue, de l’odorat et du goût : « à partir de 81, la cuvée remporte une médaille d’argent. À 85, c’est une médaille d’or et à 93, la cuvée est médaillée d’or et sacrée grand prix du Trophée ».

Après les trois mises en bouche, le ronronnement de la salle se fait entendre. On y voit des sourires, du service, on partage son avis mais surtout, on se concentre. L’équipe organisatrice du trophée a fait en sorte d’avoir un nombre de jury impair à chaque table, « c’est plus facile s’il y a un désaccord sur les notes », apprend Carole Honoré-Chedozeau, ingénieur recherche à l'IFV. Même si certaines compte 6 dégustateurs, « il faut toujours faire avec les absents de dernière minute ». De temps en temps, la salle devient plus bruyante, « ça s’entend au bruit quand les échantillons sont sujets à discussion », sourit-elle. Aux tables, les professionnels sont bien représentés : œnologues, restaurateurs, caves coopératives, vignerons ou encore négociant, la diversité est reine. En parlant de diversité, le nouveau nom du Trophée, qui se déroule depuis trois ans à Anse et n’avait plus lieu de conserver Lyon dans son nom, implique un petit changement pour les jurys : « il n’est plus indiqué si les échantillons dégustés sont des beaujolais ou beaujolais villages. Le règlement intérieur a été revu et nous avons fait le choix de garder une seule catégorie puisque nous sommes sur la même appellation. Le concours est représentatif du marché et on souhaite en voir l’essence ».  

Renouement avec le fruit rouge

Aux tables, les calculettes aident les présidents à calculer la moyenne. De temps à autre, des applaudissements viennent rythmer l’ambiance studieuse de la salle, synonyme d’un grand prix désigné. Dès 10h30, les premières tables de jurys ont entamé une pause entre les deux séries d’une dizaine d’échantillons. « Cette année, on sent que c’est un millésime qui est davantage sur le fruit rouge avec une très belle longueur en bouche, observe Marc Rongeat, restaurateur à La Terrasse du Beaujolais. C’était une année plus difficile pour les vignerons, ce sera une bonne année pour travailler l’accord avec les plats. » En dehors de la salle de dégustation, les premiers jurys qui ont fini échangent : « les échantillons représentent bien le millésime 2023, qui n’est pas hyper solaire mais on a de beaux arômes. Il est croquant, gourmand et fruité. Nous n’avons eu aucun défaut majeur ».

De toute évidence, « ce millésime a des expressions très diverses qui relatent bien le climat de cette saison. Ce sont des vins légers, sur le fruit et faciles à boire. Nous avons aussi des vins plus colorés et puissants qui marquent une hétérogénéité mais qui restent très qualitatifs. On en a pour tous les instants de dégustation. Ce n’était pas un millésime facile et il fallait vraiment être pointilleux car c’est dans le détail que se voit la qualité. Il fallait accompagner les vins jusqu’à la mise en bouteille », résume Franck Dubœuf, directeur des vins Georges Dubœuf. Cette année est donc le retour des primeurs sur le fruité. « C’est un millésime très beaujolais, fruité croquant, comme un primeur traditionnel », conclut Lydie Nesme, négociante.

95 cuvées ont été récompensées, dont 11 grand prix du trophée, 75 médailles d’or et 9 médailles d’argent.

Charlotte Favarel

Retrouvez le palmarès sur le site www.trophee-beaujolais.com