Viticulture
Beaujolais : remontées de terrain pour la préfète de région
La préfète de la région, Fabienne Buccio, a visité des domaines viticoles du Beaujolais pour discuter des enjeux liés à la qualité de la récolte, à l’urbanisation, à la main-d’œuvre et au logement agricole.
Le jeudi 19 septembre, la préfète de la région Aura, Fabienne Buccio, s’est rendue dans le Beaujolais pour rencontrer plusieurs acteurs de la filière viticole. À travers ses visites au domaine Les Garçons à Charentay et au domaine Matray et Filles à Fleurie, elle a pu échanger avec les viticulteurs sur des problématiques essentielles telles que la qualité de la récolte, les difficultés liées à l’urbanisation, les défis de la main-d’œuvre, et les enjeux du logement agricole.
Une récolte sous tension : qualité au rendez-vous mais faibles volumes
La tournée de Fabienne Buccio a débuté au domaine Les Garçons, géré par les jeunes vignerons Loïc Crespin et Fabien Pinguet, qui travaillent en bio et biodynamie sur leurs 7 ha de vignes certifiées. Jean-Marc Lafont, président d’Inter Beaujolais, a commencé en dressant le tableau de la récolte de cette saison au niveau du vignoble : « nous attendons environ 400 000 hl cette année, soit l’une des plus petites récoltes des dix dernières années, bien loin des 570 000 hl de l’an dernier ». Une perte d’un tiers de la production, dans un contexte économique déjà difficile. Cependant, le président d’Inter Beaujolais souligne un point positif : « la qualité est là, malgré tout ». Un soulagement pour les vignerons, mais qui n’occulte pas les difficultés techniques rencontrées cette année, tant pour les exploitations en conventionnel que pour celles en bio, confrontées à des conditions climatiques exigeantes et une « raréfaction des produits de protection autorisés ».
L’enjeu du bâti agricole
Depuis son installation en 2018, Loïc a fortement augmenté sa production, passant de 1 400 bouteilles en 2020 à plus de 20 000 en 2023, malgré des conditions climatiques difficiles. Fabien, associé depuis 2022, gère le volet commercial, et ensemble, ils ont créé une société qui achète et revend les vins du domaine. Cette structure a permis de stabiliser l’entreprise financièrement. Ils prévoient de la transformer en EARL avec deux associés pour assurer sa pérennité. Loïc Crespin et Fabien Pinguet ont témoigné des obstacles qu'ils ont rencontrés dans leur parcours d’installation. L’une des problématiques majeures évoquées est celle des bâtiments agricoles, principal frein à l’installation. Loïc a partagé ses inquiétudes quant à la perte imminente de leur cuvage familial : « nous vinifions dans le cuvage de mes parents, mais l’année prochaine, lorsqu’ils prendront leur retraite, le bâtiment sera vendu avec leur maison. Il n’est pas considéré comme un bâtiment agricole ». Une situation complexe qui souligne le besoin pressant de créer de nouvelles infrastructures adaptées à la production. « On se bat pour préserver le bâti agricole », soutient Pascal Girin, président de la chambre d’agriculture du Rhône, annonçant un travail engagé avec la sous-préfecture pour remédier à cette carence de l’habitat agricole. Par chance, le domaine Les Garçons a une parcelle de 4000 m constructible en agricole.
L’enjeu du logement saisonnier : une problématique récurrente
La question du logement des travailleurs saisonniers a également été au centre des discussions. « Nous logeons nos vendangeurs dans des dortoirs, mais nous allons perdre ces bâtiments en novembre », témoigne Fabien Pinguet. Avec une main-d’œuvre de plus en plus difficile à recruter, notamment aux portes de Lyon, l’augmentation des normes de sécurité pour les hébergements saisonniers est un frein pour beaucoup de vignerons.
Jean-Marc Lafont a déploré ces exigences croissantes : « les normes pour loger les vendangeurs sont devenues plus strictes que pour les gîtes. Nous n’avons plus le droit de mettre des lits superposés, ce qui complique encore plus la tâche ». Face à ces contraintes, la préfète a proposé d’explorer la possibilité d’expérimenter des permis précaires pour des constructions saisonnières et des solutions alternatives comme les mobil-homes, moins coûteux et plus flexibles. Une expérimentation sera conduite en 2025 à cet effet en Pierres dorées. « Nous devons expérimenter des solutions pour répondre à ces besoins, comme cela a été fait dans d’autres secteurs agricoles. Les résultats seront étudiés pour une extension potentielle au Beaujolais », a-t-elle déclaré.
L’urbanisation et la cohabitation avec les riverains : une préoccupation majeure
L’arrivée de nouveaux habitants dans les zones rurales, souvent non familiarisés avec les activités agricoles, génère des tensions entre viticulteurs et riverains. Évelyne Jomard, maire de Charentay, a souligné les problèmes rencontrés : « certains habitants n’ont pas conscience de l’espace. Les vignes ne sont pas des terrains de jeux ». Fabien Pinguet a illustré l’importance du dialogue avec les riverains : « il est essentiel de sensibiliser les nouveaux habitants aux réalités de notre travail. Lorsque les gens comprennent que nous travaillons en biodynamie et que nous les informons à l’avance des traitements, il est plus facile de trouver un terrain d’entente ». Cette démarche pédagogique est encouragée par la préfète, qui a incité les viticulteurs à prendre une part active dans les conseils municipaux afin de mieux défendre leurs intérêts.
Une dynamique d’exportation à préserver malgré les incertitudes
Le Domaine Les Garçons, dont 80 % des ventes se font à l’export, notamment aux États-Unis, a également mis en lumière les enjeux économiques liés aux marchés étrangers. « Nous avons fortement développé notre présence sur les réseaux sociaux, en particulier Instagram, pour atteindre notre clientèle. Mais les taxes à l’importation risquent de modifier nos segments de prix, et toute notre communication devra être réadaptée », explique Loïc Crespin. L’exportation est un pilier pour de nombreux domaines du Beaujolais, mais les fluctuations des tarifs internationaux et les exigences réglementaires constituent un défi constant.
Le domaine Matray et Filles : faciliter l'installation
Au domaine Matray et Filles, à Fleurie, Maud Matray, nouvelle viticultrice, incarne le renouveau du vignoble beaujolais. Ingénieure de formation et issue du secteur du BTP, elle s’est installée sur le domaine familial en 2022, après avoir rejoint l’exploitation en 2020 en tant que salariée. Aujourd’hui, elle travaille aux côtés de son père. « Nous cultivons 15 ha de vignes, principalement en fleurie, et avons commencé à produire des bouteilles, ce qui était inexistant lorsque je suis arrivée. Nous en sommes à 20 000 bouteilles cette année, et nous commençons à exporter en Europe et aux États-Unis. »
Maud Matray a bénéficié d’aides à l’installation, qui ont été un gros coup de pouce, mais a également fait face à de nombreux défis administratifs : « je ne pensais pas que ce serait si lourd à gérer. Ce qui a aidé, c’est que je m’installais dans une société déjà existante avec du matériel. Je n’aurais pas fait ce projet si je partais de zéro ».
La conversion du domaine au bio a été entamée en 2018. Maud Matray souligne la pression sanitaire de cette saison : « la pression du mildiou a été énorme. Il fallait être dans les vignes en permanence pour protéger les plants, et nous avons heureusement pu compter sur du matériel adapté, financé en partie par le Plan Beaujolais ».
Des solutions locales et une action collective nécessaire
La préfète Fabienne Buccio a souligné la nécessité d’un travail collectif entre les agriculteurs, les élus et l’administration pour répondre à ces nombreux défis. « Nous devons préserver nos terres agricoles et trouver des solutions innovantes, en passant par des expérimentations locales. C’est en partant du terrain que nous pourrons faire remonter des idées nouvelles au niveau national », a-t-elle conclu.
Cette visite a permis de faire un état des lieux concret des difficultés auxquelles sont confrontés les vignerons du Beaujolais, tout en ouvrant des perspectives de collaboration et d’expérimentation pour pérenniser l’activité viticole dans cette région riche de son patrimoine et de son savoir-faire.
Charlotte Favarel
Reprise des prospections
Autre défi sanitaire sur le vignoble : la flavescence dorée. Si des efforts sont déployés pour sensibiliser et traiter les parcelles infectées, des parcelles en friche échappent aux contrôles, propageant ainsi la maladie aux exploitations voisines, remarquait Jean-Marc Lafont lors de la visite de la préfète de Région Fabienne Buccio.
Pour rappel, voici le calendrier des prospections qui reprendront à partir du 30 septembre :
- lundi 30 septembre : Corcelles-en-Beaujolais, Saint-Étienne-des-Oullières.
- Mardi 1er octobre : Belleville-en-Beaujolais, Blacé, Pommiers, Létra, coteaux du Lyonnais.
- Mercredi 2 octobre : Belleville-en-Beaujolais, Blacé.
- Jeudi 3 octobre : Belleville-en-Beaujolais, Saint-Étienne-des-Oullières, Lachassagne, Val d'Oingt.
- Vendredi 4 octobre : Saint-Georges-de-Reneins, Lachassagne, Létra.
- Lundi 7 octobre : Marchampt, Arnas Anse, Vindry-sur-Turdine, Chazay-d'Azergues et Morancé.
- Mardi 8 octobre : Émeringes, Odenas et Marchampt, Rivolet et Saint-Étienne-La-Varenne, Anse, Saint-Jean-des-Vignes.
- Mercredi 9 octobre : Jullié, Le Perréon, Gleizé, Theizé, Lucenay et Bully.
- Jeudi 10 octobre : Fleurie, Odenas, Arnas, Saint- Étienne-La-Varenne, Gleizé, Saint Vérand.
- Vendredi 11 octobre : Villié Morgon, Le Perréon, Ville-sur-Jarnioux, Saint-Vérand, Lucenay.
- Lundi 14 octobre : Saint Julien, Theizé, Marcy, Charnay et Alix.
- Mardi 15 octobre : Beaujeu, Saint- Étienne-La-Varenne, Cogny, Moiré et Frontenas, Charnay.
- Mercredi 16 octobre : Les Ardillats, Denicé, Bagnols, Lozanne.
- Jeudi 17 octobre : Saint-Étienne-La-Varenne, Bagnols et Bully.
- Vendredi 18 octobre : Villié Morgon, Denicé, Légny et Le Breuil.