Œnotourisme
Parc Salmanazar, épisode 1 d’une aventure agri-œnotouristique

Charlotte Favarel
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Si son nom fait référence à une très grande bouteille de champagne, le parc Salmanazar, lui, accueillera une cave de vinification et d’élevage d’une capacité de 10 000 hl d’ici les vendanges 2024. Mardi 20 juin, Véronique et Olivier Bosse-Platière ont présenté ce projet d’envergure à Morancé, au clos de Beaulieu, futur site œnotouristique. 

Parc Salmanazar, épisode 1 d’une aventure agri-œnotouristique
Vue aérienne de ce à quoi ressemblera le projet Salmanazar, avec le pôle œnotechnique sur la droite. Crédits : Parc Salmanazar

« Au tout début, nous pensions poser la première pierre en petit comité, mais après plus de six mois de travaux, il y a une nécessité de parler plus largement du projet », lançait Olivier Bosse-Platière lors de l’inauguration du projet Salmanazar, le 20 juin dernier au clos de Beaulieu, à Morancé.

Une seconde vie structurante pour la viticulture

Déjà propriétaires du château de Lachassagne, du domaine Bosse-Platière et du domaine Paris l’Hospitalier, Véronique et Olivier Bosse-Platière ont acquis en 2022 le clos de Beaulieu, un site de 30 ha classé monument historique. Tombé dans l’oubli depuis 2013, l’ancien centre de soin a aujourd’hui de beaux jours devant lui. C’est là tout le projet du parc Salmanazar : si depuis six mois les travaux ont commencé pour le centre de vinification, pour la seconde partie du projet ce sera en 2025. « Le pôle œnotechnique est totalement intégré dans le paysage, décrivait Romain Bole aux abords du chantier, chef de projet du parc. Le bâtiment est divisé en trois parties : la cuverie, la zone d’élevage qui peut accueillir 600 fûts et une zone de stockage d’une capacité de 400 000 bouteilles. On a profité du talus naturel du sol pour penser le bâtiment. » Avec 3750 m2, ce seront plus de 130 ha qui y seront vinifiés, « avec une possibilité de faire des vinifications parcellaires grâce à de petits ensembles ». Au total, plus d’une douzaine d’appellations seront vinifiées, « avec des outils modernes pour privilégier un travail physique et supprimer les intrants afin d’être le plus qualitatif possible », ajoute Olivier Bosse-Platière. Le bâtiment sera équipé de 750 panneaux photovoltaïques, « ce sera surtout de l’autoconsommation avec un peu de revente », précise le chef de projet. Et les Bosse-Platière ont mis un point d’honneur à ce que les entreprises locales participent aux travaux, « on a une quinzaine d’entreprises qui interviennent pour le pôle œnotechnique, presque toutes de la Région ». Un projet à hauteur de 10 millions d’euros.

Dans la zone de stockage encore en travaux, tiré-bouché, palettes, mise en bouteille et habillage occuperont l’espace. Crédit : IAR

Jouer dans la cour des grands

Quand les Bosse-Platière se sont installés en 2007 à Lachassagne, la période compliquée qu’a connue le vignoble a marqué Olivier. « Les ventes étaient en-dessous des coûts de revient, il y a eu la prime à l’arrachage… On a perdu la moitié de la surface. Pour l’appellation beaujolais, on est passé de 23 000 ha à la fin des années 1990 à 12 000 ha. Ce sont deux tiers du vignoble qui ont disparu, se souvient-il. Nous avons été nombreux à replanter du chardonnay pour le crémant, et je pense que, sans ça, une grande partie aurait disparu. » Il partage ses chiffres : 10 % du volume des vins de Bourgogne viennent du Beaujolais et sur le département, 51 % de la surface produit du crémant, soit 12 millions de bouteilles. « Pourtant, la production n’a pas la visibilité qu’elle mérite, il est urgent de se réapproprier ces vins et la légitimité à en produire. Le Beaujolais retrouve ses lettres de noblesse et c’est réjouissant. Autant que de voir de nouveau, un vignoble respecté et même envié. » Et le vigneron voit plus grand pour le territoire des Pierres dorées : « nous produisons de très grand blancs avec nos terres argileuses, de Pommiers à Saint-Jean-des-Vignes, nous avons toutes les cartes en main pour jouer dans la cour des grands ».

Un parcours du combattant ? 

« Ce parc agro-œnotouristique d’envergure nationale est un projet qui témoigne de la passion commune du territoire qu’ont Véronique et Olivier. Salmanazar est un projet structurant, une valorisation pour le beaujolais et les grands vins, démontrant un savoir-faire et une inspiration entre tradition et patrimoine de demain », souligne la maire de Morancé, Claire Peigné. Il faut dire que les collectivités ont œuvré avec le couple de vignerons pour que ce projet voit le jour. Depuis huit ans, après des études d’urbanisme, la transcription dans le PLU et l’attente des autorisations de construire, État, Région, Safer et communautés de communes ont accompagné les Bosse-Platière. « C’est un choix politique fort, que de retirer le bien qu’est le clos de Beaulieu à des promoteurs pour en faire un lieu accueillant proposant activités touristiques et culturelles. Je tire un grand coup de chapeau aux élus », saluait Olivier Bosse-Platière.

Plusieurs élus avaient fait le déplacement pour l’inauguration du projet. Crédit : IAR

L’agriculture au cœur du projet

Si aujourd’hui les travaux sont engagés sur la partie vitivinicole, un deuxième volet devrait débuter dès 2025. « L’ouverture au grand public est un choix et celui de faire valoir les métiers agricoles avec une ferme pédagogique, un verger conservatoire etc. est là, insistait le vigneron. En termes d’animations culturelles, le lieu accueillera restaurants, hébergement et séminaires. » Un atout majeur pour le développement de l’œnotourisme. À l’avenir, ce pôle ouvert au grand public pour comprendre les métiers agricoles aimerait également compter une tonnellerie et une distillerie.

Une étude des architectes des Monuments historiques sera lancée en septembre 2023 durant six mois. Elle permettra de déterminer le « comment » de la réalisation. Un moyen de valoriser le patrimoine existant datant de plusieurs siècles et d’allier une offre agri-oenotouristique. L’essor de ce projet devrait permettre de créer 40 emplois.

Charlotte Favarel

Romain Bole, chef de projet du parc Salmanazar, nous explique les contraintes du chantier