Viticulture
Salmanazar acte 2 : la cave
Le 22 octobre, la nouvelle cave du parc Salmanazar a été inaugurée, marquant un pas important pour ce projet durable et innovant mené par les Bosse-Platière à Morancé. Conçue pour allier respect de l’environnement et mise en valeur du terroir, cette cave s’inscrit dans une vision ambitieuse pour l’œnotourisme et le rayonnement du Beaujolais.
Le 22 octobre dernier, la cave du parc Salmanazar, projet ambitieux mené par Véronique et Olivier Bosse-Platière, a été inaugurée à Morancé. Après un premier épisode centré sur les objectifs du parc en 2023, cette deuxième étape concrétise une partie essentielle du projet, axée sur une cave à la conception unique, respectueuse de l’environnement et pensée pour valoriser le terroir du Beaujolais et de la Bourgogne.
Une visite immersive et structurée
Dès le début de la visite, Marc Robin, responsable vignoble, a présenté l’un des quatre pôles successifs de la cave. Trois domaines viticoles alimentent cette structure : le château de Lachassagne, le domaine Bosse-Platière et le domaine Paris l’Hospitalier, chacun apportant une diversité de cépages rhônalpins, transformés grâce à des installations modernes et polyvalentes. « L’intégralité de nos raisins vendangés à la main est traitée ici, on dispose d’un tapis élévateur et tout a été conçu pour recevoir de diverses façons. Que ce soit pour une vinification par lots ou pour un pressurage direct », explique Marc Robin.
La diversité des cuves et des pressoirs permet d’adapter le traitement des raisins, favorisant une approche parcellaire pour sublimer chaque lot de vin. L’espace a été conçu pour optimiser le travail des équipes tout en intégrant des pratiques durables, renforçant ainsi l’identité innovante du parc Salmanazar.
Éco-conception et fonctionnalité au cœur de la cave
Maxime Dornier, co-gérant de Sicoé, société d’ingénierie process, a détaillé les installations éco-conçues : « la cave est entièrement thermorégulée et fonctionne en partie gravitaire, limitant ainsi le recours au pompage et réduisant notre consommation énergétique ». La cave, d’une capacité totale de 12 000 hl répartis sur 150 cuves, offre un potentiel unique pour les vinifications parcellaires, permettant ainsi des méthodes de production sur mesure.
L’accent a également été mis sur des pratiques de vinification soignées, avec une utilisation modérée de l’eau, un sol en pente résiné, et des pompes équipées de variateurs de vitesse pour un impact écologique maîtrisé. « L’éco-conception est centrale dans ce projet, et tout a été pensé pour un impact minimum sur notre environnement », précise Maxime Dornier.
Un chai alliant patrimoine et innovation
Sous la direction de Romain Bole, chef de projet depuis trois ans, toute cette partie cave a été pensé pour allier tradition et modernité. Construit dans les 30 ha du parc classé du clos de Beaulieu, ce bâtiment de 4 200 m² a été soigneusement implanté pour respecter l’architecture locale et se fondre dans le paysage. Romain Bole ajoute : « nous avons cherché à intégrer la cave de manière à ce qu’elle disparaisse dans la végétation. C’est un bâtiment fonctionnel, durable et respectueux du patrimoine ».
Le chai peut stocker jusqu’à 350 000 bouteilles en tiré bouché, tandis que l’espace d’élevage peut accueillir 600 fûts. Cette structure permet de centraliser la production et d’assurer des conditions de conservation optimales, participant à la montée en qualité des vins produits.
Vers une valorisation du Beaujolais en Bourgogne
Lors de son discours, Olivier Bosse-Platière a rappelé son engagement pour faire rayonner le Beaujolais aux côtés des appellations bourguignonnes : « je suis convaincu que le Beaujolais est une partie intégrante de la Bourgogne viticole. Nous avons un vignoble transformé, prêt à rivaliser avec les meilleurs crus ». Il a évoqué son espoir de voir les appellations du Beaujolais être reconnues pour leur qualité en Bourgogne, et exprimé sa volonté de développer un négoce vinificateur à la fois bourguignon et beaujolais dans le sud du territoire.
Pour les Bosse-Platière, cette nouvelle cave est une étape cruciale dans leur projet. Après huit années de démarches et de travaux, ils envisagent déjà l’épisode suivant, avec des plans pour développer un pôle œnotouristique complet incluant une distillerie, une tonnellerie, et des installations touristiques. La vision d’Olivier Bosse-Platière est claire : « nous croyons fermement au potentiel de ce territoire et nous voulons en faire un site phare pour les visiteurs et amateurs de vin ».
Un projet ambitieux pour le territoire
L’architecte Thomas Fayolle, qui a travaillé sur le projet, se dit fier de cette réalisation : « le défi principal était de faire disparaître un bâtiment de plus de 4 000 m² dans le paysage, tout en respectant l’intégrité de ce parc historique ». Une prouesse rendue possible grâce à une équipe d’architectes et d’artisans investis, et un partenariat étroit avec les collectivités locales.
Le projet Salmanazar ne cesse de prendre de l’ampleur, et son rayonnement attire déjà l’attention, tant des amateurs de vin que des visiteurs. Le couple Bosse-Platière espère voir les travaux démarrer en 2026, avec une ouverture en 2028 pour cette prochaine phase dédiée à l’œnotourisme. En attendant, cette nouvelle cave qui a accueilli les vendanges 2024 se dresse comme une étape clé pour le projet Salmanazar, portée par une vision ambitieuse et durable.
Charlotte Favarel
3 questions à…Olivier Bosse-Platière
Combien coûte un projet comme celui9-ci et quelles difficultés avez-vous rencontrées ?
10,3 millions d'euros ! On n'était pas allé au bout de notre projet professionnel, on avait envie de valoriser les vins qu'on produit et de les porter plus loin. Et puis un tel projet, cela permet de rester jeune et dynamique. Je n'ai pas envie de la retraite car mon métier me plait bien. Peut-être qu'on verra les choses différemment dans dix ans mais d'ici là on aura bien avancé.
Le plus dur c’est un parcours long avec une successions de haies à franchir. Ce n'est pas un parcours simple, il reste encore des difficultés. On a beaucoup d'aide de la mairie, de la communauté de communes, on a fait une demande de subvention mais ce sont des procédures longues. J'ai eu de l'écoute bienveillante des financiers et du Crédit Agricole en particulier, sans eux, nous n’aurions pas pu faire tout ça.
Allez-vous réadapter votre production en fonction des capacités de la cuverie ?
La cuverie fait 12 000 hl ce qui permet de vinifier à peu près 150 ha, 9000 hl de vin. Et 9000 hl de vin ça ferait 1 200 000 bouteilles si on embouteillait tout. Mais on n'a pas cet objectif de tout embouteiller car on a beaucoup de clients qui font des achats de vrac très qualitatif et on va continuer à s'appuyer d’une part sur un négoce vrac de type crémant de bourgogne et bourgogne-passe-tout-grains. D’autre part, sur du vrac bien valorisé, on travaille avec beaucoup de petits domaines dans la côte de Beaune et châlonnaise. Et puis ce que nous on va développer en bouteilles et qu’on développe déjà avec 100 000 bouteilles c'est d'aller à 300 000 bouteilles. Ici on est en Beaujolais, sur les 62 ha qu'on a on compte 15 ha de gamay, 15 ha de pinot noir, 15 ha de chardonnay et 15 ha entre pinot blanc, pinot gris, des viogniers, des syrahs des altesses des roussannes et des aligotés.
Quelle vision avez-vous des relations Bourgogne et Beaujolais ?
Il y a deux visions en Beaujolais : une vision grande Bourgogne qui consiste à dire le Beaujolais a une identité forte et il faut valoriser cette identité mais l'inscrire dans un grand bassin. Et puis il y a une vision très beaujo-beaujolaise qui consiste à dire on a notre singularité et on n'a pas besoin de plus. Ces deux visions s'opposent depuis quinze ans mais la réalité économique fait que le territoire du Beaujolais se développe sur d'autres appellations que les appellations beaujolaises. Mon Beaujolais est bourguignon et l’a toujours été, le Beaujolais fait partie de la Bourgogne viticole.